Fragile et pourtant inébranlable, la porcelaine de Limoges est l’un des fleurons du luxe à la française. Depuis 250 ans, les porcelainiers de la Haute-Vienne mettent un point d’honneur à conjuguer savoir-faire, finesse et innovation. Aujourd’hui, une nouvelle génération d’artisans parvient à sortir la porcelaine des buffets de nos grand-mères pour lui donner un nouveau souffle.
La porcelaine et Limoges sont deux entités indissociables dans l’esprit des Français. Rares sont d’ailleurs ceux qui s’y trompent en admirant une assiette à la finesse et la blancheur quasi translucide. Cet or blanc, qui a fait la richesse et la renommée du Limousin, a fêté ses 250 ans l’an dernier. L’occasion de revenir sur l’histoire de cet artisanat reconnu dans le monde entier.
La porcelaine, un objet de désir et de fascination depuis 2000 ans
Depuis le début du christianisme, les Occidentaux sont fascinés par la porcelaine chinoise. Ces pièces délicates et peintes sont acheminées vers l’Europe à prix d’or et réservées aux membres des monarchies.
A la fin du XVIIe siècle, le père François Xavier d’Entrecolles, quitte le Limousin pour la Chine, afin de tenter de percer le secret de la fabrication de la pâte à porcelaine. Hélas, aucun artisan français ne parvient à reproduire la finesse de cette matière translucide sans la briser. La technique finira finalement par être découverte à des milliers de kilomètres de la Haute-Vienne, en Saxe, par un jeune alchimiste du nom de Böttger.
L’histoire aurait pu s’arrêter là pour la capitale du Limousin, mais c’était sans compter sur la découverte en 1760 de très nombreux gisements de kaolins aux alentours de Limoges. Or, le Kaolin et l’un des ingrédients principaux de la fabrication de la porcelaine, avec le quartz et de feldspath.
Flairant l’intérêt économique pour son pays, Turgot, intendant du Limousin, décide de créer une manufacture royale de la porcelaine à Limoges. Celle-ci voit le jour en 1771 et est alimentée par l’eau de la Vienne et le bois des forêts alentour.
Après la révolution, François Alluaud devient propriétaire de la fabrique et souhaite déjà dépoussiérer la fabrication en améliorant les procédés de fabrication de la porcelaine. Au début du XIXe siècle, les manufactures fleurissent dans la ville, faisant de Limoges, la capitale européenne de la porcelaine.
Ce succès pousse les porcelainiers à parfaire leurs savoir-faire et à sans cesse se renouveler afin de proposer des pièces uniques. À partir de 1840, la haute société de Paris à New York dépense sans compter et se pâme devant ces pièces si délicates et élégantes. En 1925, l’Exposition internationale des arts décoratifs confère à Limoges le titre prestigieux de « capitale internationale de la porcelaine ».
Des arts de la table aux arts tout court
La première moitié du XXe siècle est marquée par les crises politiques, sociales et économiques qui imputent sévèrement l’industrie de la porcelaine limousine. Afin de maintenir le cap, les porcelainiers tentent de se renouveler. Commencent alors des collaborations avec des artistes de renoms. Edward Colonna, Georges de Feure et Paul Jouve, introduisent par exemple l’art nouveau dans la porcelaine de Limoges.
La porcelaine entre ainsi dans la famille des arts décoratifs, plus tard, Jean Cocteau ou encore Salvador Dali commencent même à produire leurs céramiques. La porcelaine de Limoges devient ainsi un objet d’art à part entière.
La nouvelle garde dépoussière la porcelaine
Héritier de ce savoir-faire ancestral, de nouvelles générations de porcelainiers voient le jour et réinventent la matière. Exit l’époque où la porcelaine restait sagement rangée dans les placards en attendant les grandes occasions. Fini aussi le temps où les jeunes couples s’installaient avec un service complet qui ne les quittait jamais. Les usages changent, et les artisans s’adaptent et accompagnent le mouvement en proposant des objets qui s’affranchissent des codes d’autrefois tout en gardant les fondamentaux d’une technique irréprochable.
La porcelaine n’est d’ailleurs plus seulement sur nos tables, elle se fait bijoux, objet de décoration, support photographique… et trône fièrement au cœur de nos intérieurs.
Alix D. Reynis, Maison Fragile, Singulier Origine, MASH, Jonathan Reynaud… Ces nouveaux noms ont tous comme point commun de réinventer la porcelaine en suivant la même recette que leurs prédécesseurs : mêler créativité, singularité et innovation afin de conjuguer tradition et modernité avec brio. De quoi faire perdurer la renommée de la porcelaine de Limoges pendant encore de nombreuses années.
Ce voyage en terre artisane vous a plu ? Alors, je vous emmène maintenant à l’autre bout de la France, à Vallauris, tout près du Golfe de Saint-Tropez, la découverte d’une autre capitale artisane.